Le « black-out alcoolique », également appelé « trou noir »

Comprendre le phénomène du black-out alcoolique

Définition et description du black-out

Le « black-out alcoolique », également appelé « trou noir », est un phénomène bien réel mais encore peu connu du grand public. Il s’agit d’une amnésie antérograde, c’est-à-dire une incapacité à créer et emmagasiner de nouveaux souvenirs, survenant après une consommation excessive d’alcool.

Contrairement aux idées reçues, le black-out n’est pas une perte de conscience ou un coma éthylique. La personne reste éveillée et capable d’interactions, mais son cerveau ne peut plus encoder les informations pour les transformer en souvenirs. Elle aura donc des trous de mémoire concernant tout ou partie de la période du black-out.

Cette amnésie peut être partielle, avec des souvenirs fragmentaires, ou totale avec l’impression d’avoir complètement « décroché ». Dans les cas les plus sévères, le lendemain, c’est le trou noir complet. La personne ne se souvient de rien entre le moment où elle a commencé à boire et celui où elle s’est réveillée.

Une expérience traumatisante

Se réveiller après un black-out est extrêmement déroutant et angoissant. Ne pas savoir ce qu’on a fait pendant plusieurs heures, avec qui on était, comment on est rentré, est très perturbant.

Cela génère un fort sentiment de vulnérabilité, de peur et de honte. On craint d’avoir fait ou dit des choses embarrassantes, d’avoir pris des risques inconsidérés. Les personnes victimes de black-out décrivent cette expérience comme un moment traumatisant qu’elles ne veulent plus jamais revivre.

Qui est concerné ?

Contrairement aux idées reçues, le black-out alcoolique ne concerne pas que les gros buveurs ou les alcooliques. N’importe qui est susceptible d’en faire l’expérience après une alcoolisation massive et rapide, surtout s’il s’agit d’un épisode ponctuel inhabituel.

Cependant certains profils semblent plus à risque :

  • Les femmes, plus sensibles aux effets de l’alcool.
  • Les jeunes de 18-25 ans. Près d’un sur deux a déjà vécu un black-out.
  • Les personnes fatiguées ou à jeun au moment des premières consommations.
  • Ceux ayant des antécédents de traumatisme crânien.

Par ailleurs, le fait d’avoir déjà vécu un black-out rend plus susceptible d’en refaire à l’avenir.

Causes et mécanismes du phénomène

Rôle de l’alcool et de l’hippocampe

Le black-out est directement causé par l’action de l’éthanol, molécule d’alcool pur, sur certaines zones du cerveau, particulièrement l’hippocampe.

Cette structure joue en effet un rôle central dans les processus de mémorisation, et surtout dans la consolidation des souvenirs à long terme. Or sous l’effet de doses massives d’alcool, l’hippocampe voit son fonctionnement altéré de façon temporaire.

C’est cette atteinte de l’hippocampe qui empêche le cerveau d' »enregistrer » correctement les informations pour les stocker en mémoire. Pendant le black-out, l’encodage des souvenirs est donc impossible.

Rapidité de l’alcoolisation

Plus l’alcoolémie augmente vite, plus le risque de black-out est élevé. Boire beaucoup sans manger, enchaîner les verres rapidement, font partie des facteurs déclenchants fréquents.

L’organisme n’a pas le temps de métaboliser l’alcool, qui agit alors de façon beaucoup plus violente sur le cerveau. Le taux d’alcool dans le sang augmente rapidement, dépassant le seuil d’atteinte de l’hippocampe.

Seuil fatidique

Si le seuil varie d’un individu à l’autre, on estime qu’à partir de 0,20g à 0,25g d’alcool par litre de sang, les risques de black-out explosent littéralement. À titre indicatif, ceci équivaut à 5 verres bus en 1 heure pour une femme de 65kg.

Certains chercheurs évoquent même un début de toxicité dès 0,15 g/l. Quoiqu’il en soit, plus ce taux augmente, plus l’amnésie risque d’être prolongée et ses conséquences sérieuses.

Conséquences possibles

Dangerosité immédiate

Outre le trauma psychologique, le black-out a des conséquences très concrètes sur le moment et comporte de gros dangers. Même si la personne reste éveillée et capable d’interactions basiques, ses facultés de jugement, de prise de décision, de discernement sont très altérées.

Le risque de mise en danger sous l’emprise d’un black-out est donc extrêmement élevé : conduite automobile hasardeuse, rapports sexuels non protégés, agressivité et violence, actes illicites sous impulsion comme des vols, etc.

Les victimes de black-out se réveillent d’ailleurs souvent avec des blessures, ecchymoses dont elles ignorent l’origine. Ces épisodes laissent donc des séquelles psychiques mais aussi physiques.

Risque accru à long terme

À long terme, le black-out peut également avoir des répercussions sérieuses :

  • Risque accru de dépendance à l’alcool
  • Altération durable de certaines fonctions cérébrales
  • Apparition ou aggravation de troubles psychiques comme l’anxiété, la dépression, les TOC

Le black-out est donc bien plus qu’une simple histoire de verre de trop. Ses conséquences ne doivent pas être prises à la légère.

Comment prévenir le phénomène

Les principaux facteurs de risque à éviter

Pour limiter les risques, il est essentiel d’adopter une consommation responsable d’alcool et d’éviter les principales situations favorisant le black-out :

  • Ne pas boire à jeun
  • Bien s’hydrater en alternant avec de l’eau
  • Éviter les alcools forts qui montent très vite à la tête
  • Ne pas mélanger alcool et certains médicaments
  • Faire attention en période de fatigue ou de stress intense
  • Ne pas essayer de suivre le rythme si on boit avec de gros buveurs

Les personnes ayant déjà vécu un ou plusieurs black-out doivent être encore plus vigilantes par rapport à ces facteurs de risque.

Se fixer une limite et la respecter

Il est essentiel de se fixer une limite raisonnable de verres, en fonction de paramètres personnels comme son poids, sa taille, son sexe. Et de s’y tenir scrupuleusement tout au long de la soirée.

Pour cela, voici quelques conseils pratiques :

  • Compter précisément ses verres
  • Noter ou dire à un ami désiré quand s’arrêter
  • Ralentir progressivement la cadence de consommation
  • Manger des aliments riches en sucres lents et en fibres

L’objectif n’est pas de culpaibiliser les buveurs, mais de promouvoir une consommation sensée et sans danger. Le principal est de trouver le juste équilibre.

Changer ses habitudes de consommation

Enfin, toute personne ayant déjà connu un ou plusieurs épisodes traumatisants de black-out devrait remettre en question ses habitudes de consommation d’alcool.

Un travail d’analyse avec un addictologue peut aider à identifier les facteurs de risque personnel et ainsi éviter la répétition de ces expériences pénibles. Réduire ses doses, boire plus lentement, éviter certaines occasions à haut risque sont autant de pistes à explorer.

Que faire en cas de nouvel épisode ?

Malheureusement, en dépit de toutes ces précautions, il arrive qu’un black-out survienne à nouveau. La personne se réveille avec une absence totale de souvenirs récents. Que faire dans ce cas ?

Garder son calme

Même si l’expérience est déstabilisante, il est important de rester calme et de ne pas céder à la panique. Observez votre environnement pour évaluer si vous êtes en sécurité. Vérifiez que vous n’êtes pas blessé. Buvez beaucoup d’eau pour vous réhydrater.

Inutile de lutter pour essayer de vous rappeler ou de reconstruire la soirée. En cas de black-out sévère, ces souvenirs sont définitivement perdus. Concentrez-vous plutôt sur le présent.

Parler à un proche ou un professionnel

Si vous en ressentez le besoin, n’hésitez pas à appeler un ami de confiance ou un professionnel pour vous confier. Verbaliser vos émotions, votre peur, votre honte est important. Et vous n’avez pas à traverser cela tout seul.

Un addictologue pourra aussi vous aider à comprendre ce qui s’est passé et vous conseiller pour éviter que cela se reproduise. Loin des jugements, il saura trouver les mots justes.

Tirer les leçons pour l’avenir

Enfin, une fois l’épisode douloureux passé, efforcez-vous d’en tirer les leçons pour l’avenir. Analysez honnêtement ce qui a pu déraper dans votre comportement, votre rythme de consommation.

Identifiez vos facteurs de risque personnels pour mieux les anticiper. Et ajustez vos limites si besoin pour garantir que cette mauvaise expérience ne se répètera plus.

Le black-out alcoolique n’est jamais une fatalité. À condition de mieux le comprendre et l’appréhender pour adapter son comportement en conséquence. Votre santé et votre sécurité en valent largement la peine !

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